Les éléments lourds, comme l'uranium produit par l' industrie nucléaire, sont des sources d'énergie extrêmement concentrées. S'il s'agit de bombes nucléaires, quelques livres de combustible nucléaire peuvent être aussi efficaces que des milliers de tonnes de charbon ou de pétrole, ou de puissants explosifs. L'exploitation de l'énergie nucléaire pour le vol spatial semblait donc une direction naturelle à explorer. Mais le vol spatial nucléaire n'est pas facilement réalisable. Les fusées spatiales exigent non seulement de l'énergie, mais aussi de la masse, de la matière éjectée vers l'arrière, ce que le combustible nucléaire fournit très peu. Pour les fusées, la limite n'est pas le manque d'énergie, mais la haute température atteinte. Les tuyeres utilisées sont déjà chauffées au rouge : l'addition d'un carburant encore plus énergétique élèverait sans doute la température au-delà des possibilités du métal . Le Choix du Carburant des FuséesIl reste une possibilité . Si les molécules des gaz chauds utilisés sont remplacées par d'autres, plus légères, on peut augmenter leur vitesse sans élever la température, et donc augmenter ainsi la vitesse du jet qui s'échappe . Un gaz chaud est un ensemble d'atomes ou de molécules en liberté, qui entrent constamment en collision les uns avec les autres et avec les parois de leur réservoir. Ils se déplacent d'autant plus rapidement que la température T est grande. Mais, si on compare les différents types de molécules, on trouve pour une température donnée, elles n'ont pas toutes la même vitesse v (comme vu dans la section précédente sur le canon SHARP) puisque, en fait, c'est l' énergie cinétique (1/2) mv2 qui est proportionnelle à T. Examinons deux gaz de même température T--l'un composé de molécules légères de masse m ayant une vitesse v, l'autre de molécules plus lourdes de masse M et de vitesse V. Alors, avec le raisonnement précédent : (1/2) mv2 = (1/2) MV2 Si (par exemple) M = 9m, on trouve v = 3V. Pour une même température, les molécules les plus légères se déplacent 3 fois plus vite! Les fusées chimiques les plus efficaces, par exemple ceux de la navette spatiale, brûlent de l'hydrogène et de l'oxygène pour former de l'eau ( Plus exactement, de la vapeur surchauffée). La formule moléculaire de l'eau est H2O, et puisque l'atome d'oxygène (O) est 16 fois plus lourd que celui de l'hydrogène (H), la molécule d'eau est de 18 fois le poids de l'atome d'hydrogène, ou 9 fois le poids de H2 (La molécule, forme habituelle de l'hydrogène ) Et si l'échappement n'était pas " bêtement " de l'eau H2O mais simplement de l'hydrogène H2! Alors, ses molécules se déplaceraient 3 fois plus vite pour la même température (comme indiqué ci-dessus) et la réaction d'échappement en serait d'autant plus rapide. Malheureusement, il n'existe aucune réaction chimique pratique qui donne H2. Mais, avec une puissance nucléaire sans limite, il n'est pas nécessaire de tout consommer, et du gaz hydrogène pourrait être chauffé dans un réacteur nucléaire puis éjecté vers l'arrière par une grande tuyère. C'était l'idée du projet " NERVA ", la tentative de la NASA dans les années 1960 pour construire une fusée nucléaire. Faire fonctionner un réacteur nucléaire à la haute température d 'un moteur de fusée est difficile à imaginer. Mais puisque son rendement est favorisé d'un facteur 3, il reste très avantageux même à une température inférieure. Quelques modèles expérimentaux de fusée nucléaire ont été testés sur le terrain, mais finalement le risque de contamination par la fusion nucléaire était trop important et le projet a été arrêté. Projet OrionUne approche complètement différente du vol spatial est celle du physicien nucléaire Théodore Taylor, qui avait mené à bien une carrière dans la mise au point des bombes nucléaires et qui, pris de doutes personnels, s'est ensuite entièrement consacré à d'autres taches . Taylor avait projeté rien de moins qu'un vaisseau spatial propulsé par bombes atomiques. Sa partie arrière aurait été constitué d'un plateau métallique massif, troué en son centre. A intervalles appropriés une bombe atomique y aurait été éjectée et éclaterait à une distance convenable de la fusée. La bombe serait entourée d'un plastique riche en hydrogène, que l'énorme chaleur transformerait immédiatement en un gaz extrêmement chaud, très riche en hydrogène. Ce gaz, se dispersant dans l'espace, frapperait avant tout le plateau, et la pression propulserait le vaisseau spatial vers le haut. L'idée avait été d'abord émise par Ulam et Everett en 1955, mais aucun vol spatial pratique n' a pu être réalisé (Stanislaw Ulam fut aussi l'un des concepteurs pratique de la bombe H. (Voir "le Soleil Sombre" de Richard Rhodes). En 1958 Taylor obtenait l'appui de l'armée de l'air et le projet, nommé "Orion", commencait. Il a attiré une équipe de rêveurs pratiques, parmi eux Freeman Dyson, un physicien théorique distingué de l'Institut des études Avancées de Princeton
Les sept années suivantes, les plans d'un vaisseau spatial propulsé par bombes ont pris corps, moyennant environ 10 millions de dollars. Des maquettes de ce vaisseau ont été réellement construits et dans une expérience tout à fait réussie un modèle a été propulsé en hauteur par une série de charges explosives conventionnelles, éjectées de l'arrière. Bien que les détails restent confidentiels (ils concernent beaucoup la technologie des bombes), les concepteurs déclarent qu'aucun problème technique ne fut une pierre d'achoppement, ni l'orientation vers le bas " du propulseur plat ", soumis aux explosions, ni le danger d'irradiation des passagers du vaisseau spatial, ni d'autres détails. "Orion" est destiné aux énormes vaisseaux spatiaux, pesant des milliers de tonnes. On a parlé d'un vol vers les étoiles lointaines avec un vaisseau spatial " classique " mais de 40 millions de tonnes, actionnés par 10 millions de bombes! Finalement ce projet a été abandonné, parce que la perspective de faire éclater un aussi grand nombre de bombes nucléaires dans ou près de l'atmosphère a semblé trop effrayante. Le monde s'est réveillé pour comprendre dans quelle mesure les débris radioactifs contaminent l'atmosphère et un traité interdisant les essais nucléaires a été signé en 1963, entraînant aussi la fin de "Orion". |
En savoir plus:Site du Web " Nuclear Rocket Technologies." Published April 2002: Project Orion: The True Story of the Atomic Spaceship by George B. Dyson, George Dyson, David Sobel (Editor) Des précisions sur Theodore Taylor (incluant une section sur "Orion") peuvent être trouvées dans le livre de John McPhee The Curve of Binding Energy,( la Courbe de l'énergie contrainte )" Farrar Strauss Giroux, New York 1974. "Rubbia proposes a speedier voyage to Mars and back ( Rubbia propose un voyage très rapide aller et retour vers Mars ", informations par Alison Abbot sur une idée de Carlo Rubbia, Prix Nobel de physique, un nouveau concept de fusée nucléaire de TYPE NERVA. "Nature", vol 397, page 374, 4 February 1999. "Experiments with Bomb-Propelled Spaceship Models ( Expérimentation de modèles de Vaisseaux spatiaux propulsés par bombes )", p. 320 in Adventures in Experimental Physics ( Aventures de Physique Expérimentale )β, edité par Bogdan Maglich, World Science Education 1972. "Mort d'un Projet" de Freeman Dyson, Science, vol. 149, p. 141-4, 9 July 1965. "Le Transport Interstellaire" de Freeman Dyson, p. 41, Physics Today October 1968. La conception du vaisseau spatial Orion peut être trouvée dans la même publication |